La 26ᵉ édition des Journées Théâtrales de Carthage (JTC) s’est ouverte avec éclat grâce à la majestueuse production du « Roi Lear », présentée par le Théâtre National Égyptien. Mise en scène par Shadi Sorour, la pièce réunit une troupe confirmée menée par la légende vivante Yahia Fakharani, accompagné de Tarek Desouki, Hassan Youssef, Ahmed Othman, Tamer Al-Kachaf, Amal Abdallah, Iman Regaï et plusieurs autres figures du théâtre égyptien. Le texte est une traduction de Fatma Moussa.
Au cœur de la pièce, Shakespeare interroge l’illusion du pouvoir. C’est elle qui pousse Lear à céder son royaume à ses deux filles, avant de sombrer dans la folie. Dans cette nouvelle interprétation, Fakharani incarne un roi qui s’accroche désespérément à l’idée d’une autorité totale, pensant même maîtriser les sentiments de ses enfants. La première confrontation avec la vérité le brise et ouvre la voie à l’une des tragédies les plus féroces du répertoire.
Pour raconter cette histoire et attirer l’attention du public surtout que l’œuvre est d’une durée de 3 heures, Shadi Sorour propose une scénographie en constante évolution, d’une grande maîtrise visuelle, recourant aux nouvelles technologies. Le décor évoque avec réalisme un palais royal, tandis que l’éclairage sculpte des atmosphères contrastées : éclats dramatiques, ténèbres oppressantes lors des scènes de guerre. La musique, dominée par les trompettes et tambours de guerre, accompagne magnifiquement la montée en tension. L’usage du « mapping vidéo », inspiré du cinéma, fluidifie les transitions et crée des images qui demeurent inoubliables. Les costumes constituent l’un des points forts du spectacle : tissus nobles, couleurs finement choisies, cohérence parfaite entre les personnages et leurs tenues. Chaque figure scénique y gagne en présence et en densité dramatique.
Un Lear magistral
Les comédiens excellent dans la maîtrise du texte, joué en arabe littéraire avec quelques touches du dialecte égyptien surtout dans les interventions savoureuses du bouffon, véritable conscience lucide de la pièce.
À plus de quatre-vingts ans, Yahia Fakharani offre une composition d’une finesse rare. Caméléon émotionnel, il traverse la folie, la lucidité, l’humour et la détresse avec la maturité d’un géant du théâtre arabe. Sa présence magnétique donne à Lear une dimension nouvelle, intime et déchirante, faisant de cette version 2025 un moment fort de la scène régionale.
En ouvrant la 26ᵉ édition des JTC, « Le Roi Lear » rappelle la puissance intemporelle du théâtre classique.
Bien applaudie par la publication, cette création du Théâtre National Egyptien marquera certes les annales des JTC et la mémoire de ceux qui ont été présents et également de ceux qui n’ont pas réussi à trouver des billets (sold out). Elle marquera également la mémoire de Yahia Fakhrani que e comité directeur des JTC lui a décerné un Tanit d’honneur pour l’ensemble de sa carrière.












































