Vanessa Moungar, directrice du département Genre, femmes et société civile de la Banque africaine de développement s’est rendue à N’Djaména, au Tchad, les 3 et 4 décembre, afin d’échanger avec les acteurs locaux du gouvernement, du secteur privé et de la société civile, au sujet de l’autonomisation des femmes au Tchad et au Sahel, ainsi que des priorités d’action pour donner les moyens aux femmes de participer pleinement à l’économie et à la croissance de leur pays.
En effet, au Tchad, les femmes font face à de multiples défis, notamment en matière d’accès à l’éducation et aux services de santé. Le taux d’alphabétisation des femmes est de 14 % alors qu’il est de 31 % pour les hommes (Unesco, 2016), et le taux de mortalité maternelle est parmi les plus élevés au monde, avec 856 décès pour 100 000 naissances (Banque mondiale, 2015). Par ailleurs, divers indicateurs soulignent les fortes disparités entre les sexes dans le pays, tels que le Global Gender Gap Index (142e/145) et l’indicateur SIGI, qui mesure l’égalité femmes/hommes dans les institutions sociales (80e/86 en 2012). Ces enjeux constituent une priorité pour les pays du Sahel, qui ont convenu de la nécessité d’accélérer l’autonomisation des femmes et l’égalité des genres en tant que moyen de renforcer la résilience des communautés et d’atteindre le développement inclusif et durable.
Au cours de l’audience accordée par la Première Dame du Tchad, Hinda Déby Itno, les réformes politiques entreprises par le Tchad pour accélérer l’autonomisation des femmes ont été discutées (adoption de la loi portant interdiction du mariage d’enfants, mise en place du Programme national genre, et validation du plan d’action). La Première Dame a souligné que les femmes entrepreneures sont actives dans des secteurs clés de l’économie nationale (agriculture, industries du textile et de la mode, services), confirmant ainsi leur importance dans le développement du pays. Bien qu’une avancée notable ait été réalisée pour réformer le cadre juridique, la Première Dame a spécifié qu’il restait beaucoup à faire pour placer les femmes au cœur du développement du Tchad et a accueilli avec enthousiasme l’accompagnement de la Banque. Selon Vanessa Moungar, « la Banque est engagée pour améliorer l’accès des femmes aux services sociaux et aux opportunités économiques. Elle est prête à soutenir le Tchad pour accélérer les efforts déjà entrepris pour libérer le potentiel entrepreneurial des femmes tchadiennes ».
Les rencontres avec la conseillère en charge du Genre à la Présidence, Odjimbeye Ngarbatna Carmel Soukate, et la ministre de la Femme, de la famille et de la solidarité nationale, Djalal Ardjoun Khalil, ont permis d’identifier les mesures entreprises par le Tchad pour répondre aux problématiques de genre, ainsi que les défis liés à leur mise en oeuvre dans un pays si divers et si vaste. C’est le cas du plan d’action de la Politique nationale genre qui, à travers ses six piliers, ambitionne de réduire les disparités socioéconomiques entre les sexes.
Les rencontres avec les associations féminines (la Cellule de liaison et d’information des associations féminines du Tchad, l’Association des femmes juristes du Tchad, la plateforme des femmes du G5 Sahel, l’Association des femmes peules autochtones du Tchad, l’ONG Nirvana et la Maison de la femme) et les femmes entrepreneures (Association des femmes commerçantes et chefs d’entreprise, Chambre de l’entrepreneuriat féminin au Tchad) ont révélé l’importance de l’engagement communautaire, de la sensibilisation des populations aux changements en cours et des besoins en renforcement de capacités pour traduire les engagements politiques en actions concrètes et efficaces.
Vanessa Moungar a souligné « le travail remarquable effectué par les femmes au Tchad, qui prouve qu’investir pour les femmes bénéficie directement à l’amélioration des conditions de vie des communautés ». En raison de leur expertise locale et proximité avec les communautés bénéficiaires, les organisations de la société civile jouent un rôle central dans la mise en œuvre des plans nationaux. En tant qu’intermédiaires entre les citoyens et les décideurs politiques, agences de développement et institutions internationales, elles disposent d’un avantage comparatif dans l’accompagnement des sociétés à travers une approche participative, nécessaire pour appréhender efficacement les causes profondes des inégalités de genre. Les éléments identifiés lors des différents échanges sont essentiels pour orienter les prochaines étapes de la collaboration entre la Banque et le Tchad sur cette question décisive pour le développement durable du pays.
Avec BAD