Cette semaine, la Journée internationale de la Jeunesse sera célébrée sur le thème : « Espaces sécurisés pour les jeunes ». Avec plus de 200 millions d’habitants âgés de 15 à 24 ans, l’Afrique est composée de la plus forte population de jeunes dans le monde. Les tendances actuelles laissent présager que ce nombre va doubler d’ici 2045. L’occasion était trop belle : la Banque africaine de développement renouvelle son engagement en faveur d’un programme de transformation économique inclusif axé sur les jeunes du continent.
Les milliers de jeunes africains désespérés, qui s’échouent sur les plages du Nord chaque année, suscitent l’indignation dans le monde entier. Tout aussi déplorable est l’exode silencieux de la jeune élite de ce continent vers l’occident, en quête d’une « vie meilleure ». Ces deux catégories d’émigrés fuient la pauvreté. Invariablement, l’Afrique exporte son avenir en masse.
La Banque africaine de développement œuvre tout particulièrement à inverser cette tendance. C’est l’avenir de l’économie agricole et industrielle de l’Afrique ainsi que la place de ce continent dans la Quatrième révolution industrielle, encore naissante, qui sont en jeu. Les migrations et les mauvais choix économiques, en plus d’une combinaison d’autres facteurs, ont certes plombé les efforts de l’Afrique pour s’industrialiser au cours de la décennie passée. La Banque est néanmoins sur la bonne voie pour stopper l’exode du bien le plus précieux dont dispose ce continent, autrement dit, ses jeunes.
Pour attirer davantage de jeunes africains vers l’agriculture, la Banque a investi depuis 2016 plus de 800 millions de dollars, en particulier à travers des actions de soutien aux jeunes agriculteurs, dans plus de 15 pays. Elle mobilisera également plus de 1,5 milliard de dollars par an sur les dix prochaines années afin d’aider ces jeunes entrepreneurs agricoles (ou « agripreneurs »). En outre, afin d’accélérer l’industrialisation de l’Afrique, la Banque fait la promotion de zones économiques spéciales (ZES) à travers le continent en vue d’attirer des investisseurs dans son secteur industriel. Des zones qui demandent un important contingent de la jeune main d‘œuvre…
Des programmes qui traduisent la vision optimiste de la Banque quant à la capacité du continent à résoudre ses problèmes. Dans le même sens, elle lancera en novembre 2018 le Forum de l’Investissement en Afrique, un marché pour les investisseurs intéressés à miser sur le continent. Les 7 et 8 novembre prochains, à Johannesburg, en Afrique du Sud, des projets bancables seront présentés, pour attirer des financements et servir de plateforme aux investissements dans plusieurs pays.
« L’Afrique doit cesser d’être un musée de la pauvreté. Ses populations sont résolues à renverser cette tendance. L’avenir des jeunes africains n’est pas en Europe, leur destin n’est pas de périr en Méditerranée », a déclaré aux journalistes Akinwunmi Adesina, président de la Banque africaine de développement, lors des 53es Assemblées annuelles de l’institution, qui ont eu lieu à Busan, en Corée du Sud, en juin dernier.
Le choix de ce pays d’Asie de l’Est pour discuter des ambitions économiques et de l’industrialisation de l’Afrique n’est pas fortuit. Autrefois classée parmi les nations les plus pauvres du monde, la Corée du Sud occupe à présent la 11e place mondiale des pays économiquement développés. Elle doit cette position à ses investissements constants dans l’éducation, les services de santé et les infrastructures intelligentes… Quel signal faut-il en tirer pour la dynamique d’industrialisation en Afrique ?
Pour rappel, les jeunes représentent déjà 60 % de la population africaine sans emploi. S’ils nourrissent l’ambition de transformer leur économie, les pays africains auront besoin d’institutions fondées sur le savoir et d’un atout indéniable que représente une jeunesse instruite et bien formée. Alors que l’estimation de la Banque africaine de développement en termes de déficit en matière d’infrastructures de l’Afrique se situe entre 130 et 170 milliards de dollars par an, une planification proactive devient nécessaire pour garantir qu’une part significative de ces fonds aille à ce que l’on appelle les « infrastructures douces », soit les soins de santé et le capital humain.
Attirer les capitaux vers des programmes et des projets sera toujours aussi important que mobiliser la jeunesse africaine pour qu’elle s’engage positivement et se rende compte, ô combien sa contribution est essentielle à la société. La jeunesse africaine reste donc au cœur des efforts que la Banque consacre au financement du développement.
La jeunesse africaine au cœur des préoccupations de la Banque
Réduire l’inadéquation des compétences à la demande du marché du travail est l’un des objectifs de la Banque. Au cours des 15 dernières années, le Groupe de la Banque a investi plus de 1,64 milliard de dollars dans les projets d’éducation. Six millions de femmes et de jeunes africains ont pu ainsi acquérir les compétences requises pour les emplois de demain dans les TIC et les STEM (Sciences, technologies, ingénierie et mathématiques).
La Banque, première institution de financement de développement de l’Afrique, continue de progresser dans la mise en œuvre de sa stratégie orientée vers la jeunesse, qui repose sur trois piliers essentiels : l’innovation, l’intégration et l’investissement. Sa stratégie pour l’emploi des jeunes en Afrique vise à créer 25 millions d’emplois qui bénéficieront à 50 millions de jeunes au cours des dix prochaines années, en les formant aux compétences dont ils ont besoin pour obtenir des emplois décents et motivants. Il s’agit en fait de l’initiative la plus importante actuellement en cours en faveur de l’emploi des jeunes en Afrique. De 2016 à ce jour, la Banque a investi plus de 400 millions de dollars dans des opérations aussi bien publiques que privées, destinées à promouvoir l’emploi des jeunes dans divers pays du continent comme la Côte d’Ivoire, le Kenya, le Nigeria et le Rwanda.
En 2017, le président Adesina a mis sur pied le Groupe consultatif présidentiel de la jeunesse, qui fournira une orientation stratégique à la Banque dans la mise en place de sa Stratégie pour l’emploi des jeunes en Afrique. Ce groupe de réflexion, composé de neuf membres, est présidé par Ashish Thakkar, 37 ans, fondateur et président de Mara Group, une société d’investissement opérant dans plus de 20 pays africains. Entrepreneur expérimenté, Ashish Thakkar est également l’auteur de The Lion Awakes : Adventures in Africa’s Economic Miracle (Le lion s’éveille : aventures dans le miracle économique africain).
En collaboration avec Facebook, Microsoft et la Fondation Rockefeller, la Banque s’est lancée en février 2018 dans une initiative visant à créer 130 centres d’excellence à travers l’Afrique, dans le cadre de son programme Coding for Employment (Codification pour l’emploi). Ces centres s’attelleront à réduire le déséquilibre entre la formation des jeunes africains et les besoins d’embauche des employeurs.
Le Fonds fiduciaire multi donateurs pour l’innovation et l’entrepreneuriat des jeunes, mis en place par la Banque, servira d’instrument financier et opérationnel en soutien à sa Stratégie pour l’emploi des jeunes en Afrique, avec un apport initial de 4,4 millions de dollars, versé par le Danemark et la Norvège.
Au titre des autres initiatives de la Banque, il est important de rappeler celle annoncée en 2017, concernant l’élaboration de l’indice de facilitation de l’emploi des jeunes (ou EYE en anglais, Enabling Youth Employment) destinée à mesurer les résultats au niveau de l’emploi des jeunes et faciliter la mise en place de politiques nationales dans les pays africains. Ce tableau de bord, basé sur des recherches bien étayées, devrait permettre de formuler des recommandations à l’attention des décideurs concernant les politiques envisagées pour booster l’emploi des jeunes.
Nous vivons aujourd’hui, dans un monde de compétitivité, où les talents rivalisent à tous les niveaux. La poussée du dividende démographique de l’Afrique doit être canalisée afin de soutenir la productivité économique doublée d’une transformation sociale et industrielle équitable. Des actions dans ce sens pourraient aider l’Afrique à atteindre l’Agenda 2030, soit les nouveaux objectifs du développement durable adoptés par la communauté mondiale en 2015, en vue d’éradiquer la pauvreté, de protéger la planète et d’apporter à tous bien-être et prospérité.
Dans l’édition 2018 de Futurs Africains, une publication de la Banque, Mme Ruth Oniang’o, professeur, lauréate 2017 du Prix africain de l’Alimentation et fondatrice du Rural Outreach Program, affirme que la jeunesse offre à l’Afrique sa plus grande opportunité d’allier créativité et innovation, spécialement dans l’agriculture. « Nous devons trouver les moyens d’agir, pour permettre aux jeunes africains de s’engager dans des activités rémunératrices qui, non seulement leur permettront de se nourrir convenablement, mais aussi d’améliorer leur bien-être… ».
La solution à la fuite de la main-d’œuvre et des cerveaux vers d’autres horizons continent réside sans doute là : tous les jeunes méritent de réussir, d’où qu’ils viennent…
Avec BAD